Carte des tirs d'une équipe et zone d'influence des joueurs
Mettre beaucoup d'informations dans une visualisation de données est rarement une bonne idée. Ça n'empêche pas d'essayer...
L’inspiration derrière cet article part d’un projet de Mathieu Garnier pour les Cahiers du foot1, sur les zones d’influence des principaux clubs français. L’idée étant d’en faire une déclinaison pour les tirs d’une équipe, en dressant cette fois, les zones dans lesquelles un joueur réalise plus de tirs que n’importe quel autre coéquipier. Puis de voir s’il en résulte une dynamique notable.
Ôtons directement tout suspens, il y a un fossé entre l’ambition de départ et le résultat final. Mais avant de le dévoiler, expliquons les quelques choix graphiques :
Le nombre de joueurs représentés : trop de joueurs donnerait un rendu illisible. On s’est limité à ceux tirant le plus, jusqu’à atteindre environ la moitié des tirs de l’équipe, soit entre 3 et 5 joueurs. Chacun d’eux s’est vu attribuer une couleur. Quand c’est un autre joueur qui arrive en tête des tirs sur une zone donnée, on la colore par défaut en gris. Pour une meilleure contextualisation, la heatmap de chaque joueur-clé est présentée en miniature.
Caractéristique des heatmaps traditionnelles, l’opacité sert à distinguer les secteurs de tirs les plus utilisés par une équipe. Le nombre de tirs dans la zone est par ailleurs indiqué.
Ce type de carte ne convient pas à toutes les équipes. En particulier celles avec un turnover important ou des changements fréquents dans le système de jeu.
La cartographie des tirs de Brest est une des plus intéressantes. Notamment dans l’importance de Pierre Lees-Melou. Le milieu de terrain est le joueur qui a le plus tiré au sein de l’effectif breton (en partie car il a joué 22,7 des 24 matchs de l’équipe). Placé plus bas qu’un attaquant, ses frappes engrangent naturellement peu de xG : 2,1 en tout (4,5% de chances par tir en moyenne). Un faible total qu’il faut relativiser puisqu’il a déjà marqué 4 fois cette saison. Une sur-performance et une cadence (plus de 2 frappes par 90 minutes) qui incite les défenseurs adverses à monter sur lui. Libérant ainsi plus d’espace dans la surface pour ses attaquants, dont Steve Mounié, toujours très dangereux dans les duels aériens (21 tirs sur 37 de la tête) et qui occupe très bien l’axe central de la surface adverse lorsqu’il joue. Comme Jérémy Le Douaron, il officie presque exclusivement à l’intérieur de la surface. Satriano offre un profil plus varié dans son occupation de l’espace.
Si le dispositif brestois indique une bonne et ingénieuse répartition des secteurs offensifs, ce n’est pas le cas de toutes les formations. Pour Paris, on relève évidemment l’emprise de Kylian Mbappé. L’attaquant totalise plus du quart des frappes de son équipe. Avec le risque de rendre les attaques parisiennes stéréotypées et de faciliter la tâche des défenses adverses (pour peu qu’on considère que défendre sur Mbappé puisse être facile…).
Autre problématique, les zones préférentielles de Mbappé sont très marquées. Elles dessinent un arc de cercle à l’entrée de la surface. Si le joueur a souvent évolué au poste de 9 cette saison, on note qu’il ne tire jamais depuis «la petite surface». Sa distance moyenne de tir est de 15,6 m, soit 2 mètres de plus qu’un Vinicius Jr.
Les espaces qu’il délaisse devant les cages sont grisés car ils correspondent aux deux grands absents de cette visualisation, faute de temps de jeu : Gonçalo Ramos et Randal Kolo Muani. Dans ces zones-clé, on décompte sensiblement moins de tirs que chez les Brestois.
Le lien de la semaine
La jeune chaîne youtube Footy Insights offre encore peu de contenus mais de qualité. Notamment ce décryptage du jeune Matías Soulé ou cette vidéo sur les phases arrêtées de Brentford, presque un genre en soi.
Jérôme Latta, Mathieu Garnier, Géographie des supporters français, Cahiers du foot, 11 août 2020.